Livre 1:
Sommaire:
- La bataille du Grand Couronné
- Carte du Grand Couronné en août 1914
- Le Grand Couronné, la bataille qui sauva Nancy
- André notre ami, hommage à André GIRSCH
- Chroniques de Bouxières aux Chênes
La bataille du Grand Couronné.
Grand-Père
Firmin
C'est
lui le premier
Qui,
en me donnant la main
M'a
fait grimper les sentiers
Qui
mènent sur le chemin
Du
Soldat, avec de chaque côté
Les
haies, les champs et les prés.
Il
nous conduisait dans la forêt du Grand Mont
Illustre
par son nom.
"Elle
a enseveli beaucoup de nos aînés,
Dans
la bataille du Grand Couronné."
Ainsi
me parlait Grand-Père.
Les
souvenirs de la Grande Guerre
Etaient
toujours présents dans sa mémoire,
Il en
connaissait toute l'histoire:
"Tu
vois, Petite, sur le Mont d'Amance
Et sur
le Pain de Sucre, était assurée
La défense
de tout le secteur;
Dans
les forêts du Grand Couronné
Et sur
toutes les hauteurs,
Etaient
dissimulés des canons
Qui
attaquaient de front
L'ennemi,
là, tout près de chez nous
Dans
la forêt de Champenoux.
Au
plus fort de la bataille,
Beaucoup
de nos "gens de Bouxières" sont partis
Sous
une pluie d'obus et de mitraille
Sans
se retourner, craignant pour leur vie.
Certains
sont restés pour garder le bétail,
Et
surveiller les greniers remplis de foin et de paille.
C'était
un long cortège, sur le chemin,
De
femmes et d'enfants, sans oublier les Anciens
Qui
suivaient avec les pichets de vin.
Les
plus valides portaient sur leur dos
Les
hottes remplies de grosses miches de pain,
De
saucisses et de jambons
Et des
chapelets de saucissons
Le
tout,serré par des liens.
C'est
au manoir de Blanzey
qu'ils
se sont réfugiés,
Pendant
de longs jours.
Que
retrouveraient-ils à leur retour?"
Et
Grand-Père d'ajouter:
"Dans
le champ de blé,
Qu'il
avait ensemencé,
Est
tombé un soldat,un enfant du pays.
Il a
donné sa vie
pour
son village et la liberté.
Mais
surtout, n'oublie jamais: c'est ici,
Que
nous avons gagné la bataille de Nancy."
C'est ainsi que Grand-Père Firmin me
racontait la bataille du Grand Couronné; c'était toujours le même récit. Il
n'oubliait pas l'exode de Bouxières au plus fort de la bataille, et bien
souvent Grand-Père faisait sourire l'enfant de sept ans que j'étais. Il sortait
de sa poche un papier jauni par le temps, il le dépliait doucement pour ne pas
le déchirer, c'étaient des vers qu'un ami, resté en Lorraine annexée, lui avait
envoyés.
Grand-Père était arrivé enfant à Moulins. Son
Père avait fui avec sa famille une terre devenue étrangère pour eux, il avait
renoncé à tous ses biens, mais avait gardé beaucoup d'amis.
Ces quatre strophes, Grand-Père me les
déclamait sur le chemin du retour, c'était un Lorrain qui disait à son fils:
A Metz, demain, nous irons, dit le Père,
Nous monterons sur la cathédrale, tous les
deux.
Et dans un rève la nuit entière,
ils firent l'ascension, d'un élan
bienheureux.
Et le lendemain,
Des escaliers la montée fut dure;
Pas de rampe, mais dans leurs mains
Une corde froide, sans usure;
Et leurs doigts s'écorchaient contre le
mur.
"Montons encore plus haut, nous
verrons la Lorraine."
De nouveau, ils sont montés vers le ciel
souriant.
"Regarde! là-bas, dans sa douceur
fertile et souveraine,
Le pays natal s'étendre à l'Orient."
"Montons encore plus haut, et nous
verrons la France"
De nouveau ils sont montés vers le ciel
plein de lumière,
Avec au coeur une grande espérance.
Regarde! les premiers sommets que nous
voyons d'ici,
Ce sont les avant-postes du Grand Couronné
de Nancy;
C'est Sainte Geneviève et les deux monts
d'Amance,
Dont un, que je connais avec sa forêt
épaisse et sans clairière,
Le Grand Mont de Bouxières."
Et pour terminer cette jolie poésie,
Grand-Père me disait: "Ces Lorrains étaient devenus Allemands malgré
eux.Par la bataille du Grand Couronné, ils sont redevenus Français;mais comme
moi,ils sont restés Lorrains avant tout".
"Moi aussi Grand-Père, je le
resterai".
Aujourd'hui, aprés plus de cinquante années,
je n'ai pas changé d'avis.
Renée.
.
Dans
un de nos villages lorrains, le père Grégoire était une figure, l'un de ceux
qui étaient nés au village en dix huit cent trente huit; le sort ne l'avait pas
désigné pour le service militaire; de ce fait, il n'avait jamais quitté son
village natal. A vingt ans, c'était un joyeux luron qui savait conter fleurette
aux filles; le coq du village en somme.
A trente ans, il prit femme et choisit
Joséphine, une fille du village; elle n'avait pas de fortune, mais il l'aimait;
pour elle, il travaillait dur à la ferme de ses parents et quand leur fils
naquit, Julien dit "Juju", ils furent vraiment heureux. Dix ans plus
tard, il était le maître de la ferme, ses parents étant décédés; sa femme et
lui ne rechignaient pas à la tâche et, sans être riches, ils ne manquaient de
rien; à cette époque avoir sa terre et son bétail, c'était une véritable
richesse.
Les années passaient avec les joies et les
peines , mais ils faisaient face et Julien aidait à la ferme; jusqu'au jour où
tout bascula. Le père Grégoire perdit sa femme brutalement, il se sentit perdu;
il n'avait plus goût à rien et négligeait les travaux des champs, il était
temps que le Juju chausse les sabots de son père. Pour ce faire, il chercha une
femme et la trouva en la personne de Noémie, une fille du village, pas très
jolie, mais qui abattait du travail pour deux; elle amenait en dot: une vache
laitière, un cheval, un cochon, deux champs de bonne terre et un trousseau
comme il se devait à cette époque; et le tout faisait l'affaire de Julien.
Le père Grégoire se retira dans une petite
maison qu'il possédait à côté de la ferme. Du matin au soir il faisait paître
sa vache, qu'il allait chercher tous les matins à l'étable, il l'avait
surnommée "la grosse Bertha" tant elle était large; ils marchaient au
même rythme comme deux amis le long du vieux chemin. Au fil du temps le père
Grégoire était devenu sourd et ne tenait plus de conversation; les durs travaux
l'avaient plié en deux, presque à l'équerre, mais il avait gardé dans les yeux
le petit air malicieux de sa jeunesse.
De la guerre, il n'avait pas beaucoup d'informations,
il n'entendait pas le roulement incessant du canon, il était seul dans un monde
de silence; il ne savait qu'une chose, son fils le "Juju" était
mobilisé, il était parti un matin, laissant sa femme et sa fille âgée de onze
ans, avec les travaux de la ferme et des champs. Il leur avait dit:
"prenez bien soin du Père", ce qu'elles faisaient; il avait toute la
tendresse de sa petite fille qui, tous les soirs après le repas, le
reconduisait chez lui; ils s'asseyaient sur le banc de bois devant la maison et
le père Grégoire racontait les histoires qui avaient émaillé sa vie au cours
des années. Leurs éclats de rire s'entendaient jusqu'à la cuisine de la ferme,
et Noémie de dire: " ah! les deux là, ils se ressemblent ". Dans la
journée, les deux femmes avaient beaucoup de travail et ne surveillaient pas
les allées et venues du Grand-Père, mais il se faisait un devoir d'effectuer
certains travaux; donner à manger aux poules et aux lapins, éplucher les
légumes pour la soupe du soir, tirer la cruche de vin à la cave; pour lui
c'était l'occasion de boire un coup de rouge et il cachait le verre derrière le
tonneau; bien souvent il oubliait d'essuyer ses moustaches, ce qui faisait
sourire Noémie et Adèle.
En cet été de 1914, les combats faisaient
rage aux alentours, l'ennemi avançait et n'était pas très loin, la prudence
était de rigueur.
Un matin, le Père Grégoire se leva tôt,
aujoud'hui,il ferait chaud, il sortit sa vache et les voilà partis sur un
sentier au bout du village; l'herbe par la canicule se faisait de plus en plus
rare et chaque jour il allongeait le parcours. Pris par la fatigue, le père
Grégoire s'arrêta à l'orée de la forêt; un tronc d'arbre coupé assez haut était
le bienvenu pour s'asseoir:"ouf! je suis bien là!". Ses deux mains
noueuses tenaient le haut de son bâton, et son menton reposait dessus;dans
cette position il voyait devant lui et appréciait ce moment de détente. Il
n'entendit pas venir le cavalier à cheval qui sortait du bois; quelle ne fut
pas sa surprise quand il vit arriver devant lui un soldat allemand et pas
n'importe lequel, un officier fringant, astiqué de la tête aux pieds; ses
bottes de cuir, cirées et lustrées, étaient d'un noir éclatant, la veste avait
des boutons dorés et des distinctions militaires ornaient sa poitrine, son
casque à pointe ne bougeait pas au trot du cheval. Il s'arrêta devant le père
Grégoire pendant deux ou trois minutes sans bouger, comme une statue sur un
piedestal; le pauvre vieux n'en menait pas large; c'est sûr, il allait passer
un mauvais quart d'heure et pourquoi cet Allemand était venu seul jusqu'ici?
L'officier lui causait, quant à l'entendre c'était une autre histoire: "
Ecoutez, monsieur l'officier, je suis sourd comme un pot, si vous parlez le
français en prononçant bien, je pourrai lire sur vos lèvres ".Le cavalier
descendit de son cheval et la bouche bien arrondie, à la hauteur des yeux du
père Grégoire lui dit: "Connaissez-vous endroit pour voir Nancy;bientôt
armée allemande à Nancy". Suffoqué par tant d'arrogance, le père Grégoire
dit en montrant avec sa canne:" C'est pas difficile, vous entrez dans la
forêt, vous prenez le sentier à gauche et vous suivez tout droit jusqu'à un
raidillon, avec un peu d'élan vous serez vite en haut; à vous de regarder dans
la bonne direction pour apercevoir notre capitale; j'peux pas mieux vous dire
et bonne route".
Sans un merci, l'officier enfourcha sa
monture et partit au galop."Bin, mon colon, il faut que je parte en
vitesse"; il tira la corde de la" grosse Bertha ", nous n'avons
pas de temps à perdre ma vieille. Il y avait bien des années qu'il ne marchait
plus aussi vite, il courait dans la descente. De la forêt, il en connaissait
tous les sentiers et il savait qu'à l'endroit indiqué, il y avait un étang,
disons plutôt une mare d'eau vaseuse, entourée de feuilles et hautes herbes, le
tout se confondait avec le vert de la forêt touffue. Le père Grégoire, au
risque de se rompre les jambes et le coeur,allongeait le pas et contourna une
partie du bois; soufflant,suant, il détacha sa vache: "Va, rentre sans moi".
Il se faufila dans un fourré; il jubilait d'avance et pour rien au monde
n'aurait voulu manquer le début du spectacle.
A peine était-il aux aguets qu'il vit arriver
le cheval au galop et dans un élan tomba dans la mare dans une gerbe
d'eclaboussures vertes et le père Grégoire de rire à étouffer, la main devant
la bouche, ses yeux en pleuraient, la scène dépassait ses espérances. Le bel
officier se débattait au milieu de la vase et, comme un caméléon, avait pris la
couleur de la forêt; son casque était resté sur sa tête et la pointe était
ornée de grandes herbes qui lui dégoulinaient sur la figure et lui tombaient
sur les yeux, il toussait, éternuait; quant au cheval, il regagna vite la rive
pour s'ébrouer en tous sens. Notre farceur se glissa furtivement dans les
hautes herbes et regagna le chemin; avant que le Teuton ne se sorte de là, il
serait arrivé chez lui.
Quelle belle journée! Le père Grégoire était
heureux, surtout de penser qu'il avait fait perdre de sa superbe à un officier
allemand, il en était si fier qu'il arrivait presque à se redresser.
Pendant plusieurs jours, le père Grégoire
resta chez lui; la grosse Bertha paissait dans le pré avec les vaches de
l'étable. Noémie s'inquiétait, elle le voyait rire tout seul en se frottant les
mains, il avait dû prendre une insolation: "vous êtes malade le père?
toujours à courir les chemins, pour sûr, c'est de la fatigue!"; le
grand-père ne répondait pas .
Au troisième jour, Adèle dit,au milieu du
repas: "les maquignons racontent sur la place qu'ils avaient tiré d'une
mare, en forêt, un officier allemand qui dégageait une odeur à attirer une
armée de moustiques. Nous avons été obligés de l'aider à enlever ses bottes et
à se déshabiller, faire baisser culotte à l'ennemi, quelle rigolade; Jules lui
a mis sur le dos la couverture qui couvrait l'arrière-train d'un boeuf de
trait; heureusement qu'il était plus grand que nous, l'un ou l'autre n'aurait
plus de pantalon et de chaussures; il était très en colère et nous a fait
comprendre que c'était un vieux qui avait une vache tenue à la corde qui lui
avait indiqué le sentier qui devait le conduire sur une hauteur pour voir
Nancy.C'est une chance qu'il nous ait laissé partir".
"Ce ne serait pas vous le Père, par
hasard", dit la Noémie?
"Allons donc ma bonne, vous me voyez
faire un si long chemin pour arriver dans la forêt !"
Oui, Adèle le voyait bien et tout de suite
elle sut qui était l'auteur de cette blague; le coup d'oeil du Grand-Père était
significatif.
"Ouais! nous le saurons bien un
jour", dit la belle fille.
Personne au village ne fit d'allusions au
grand père, mais les sourires et les poignées de main en disaient long.
Sa petite fille était sa confidente et
pendant des années ils riaient encore de cette bonne farce.Le père Grégoire
mourut en 1919, il eut le bonheur de fêter la victoire et le retour de son
fils.
Aujourd'hui, Adèle habite toujours le village
et la maison de son Grand-Père; malgré son grand âge, sa mémoire n'a pas fait
défaut pour me raconter une nouvelle fois cette histoire et je l'en remercie.
Renée
La Bataille qui sauva NANCY
Il y a cette année 80 ans que se livrait aux
confins de notre Commune de Bouxières, un des premiers épisodes de la Grande
Guerre. Ces événements tragiques que vécurent nos grands parents eurent des
conséquences majeures sur le déroulement des hostilités et évitèrent la prise
de Nancy par l'armée prussienne;
Le Grand Couronné:
Sous ce vocable sont regroupés les hauteurs
jalonnées de crêtes: Sainte Geneviève, le Mont Toulon, le Mont Saint Jean, les
plateaux de la Rochette et d'Ecuelle, les Monts d'Amance, le Pain de Sucre, les
hauteurs de Pulnoy.
Des cours d'eau percent d'est en ouest ce
massif: la Natagne, la Mauchère, l'Amezule, la Pissotte.
Ces reliefs naturels se prolongent au sud par
le Rembetant, le plateau de Saffais, la crête de Belchamps.
La situation au printemps 1914
Après la défaite de l'armée française et la
signature du traité de Francfort (10 Mai 1871), la France est amputée de
l'Alsace et de la Lorraine du nord. Une partie des départements de la Meurthe
(Arrondissements de Sarrebourg et de Château-Salins) et de la Moselle
(arrondissements de Metz, de Thionville et de Sarreguemines) est désormais
terre d'Empire.
Près de nous, la Seille devient la frontière
entre les deux pays et les postes de douanes s'installent aux ponts de Brin, de
Manhoué, d'Arraye etc..., séparant de nombreuses familles implantées de part et
d'autre du cours d'eau.
Les habitants d'Ajoncourt deviennent ressortissants
allemands, mais le village n'ayant pas de cimetière, ils retournent après leur
mort reposer en terre française à Arraye.
Entre la France et l'Empire allemand subsiste
un climat de tension. La France songea à organiser sa défense, mais du fait de
l'opposition de l'Allemagne, qui considérait la fortification des abords de
Nancy comme un acte d'hostilité et de menace, les travaux ne furent jamais
entrepris sérieusement.
Néanmoins, à chaque manifestation agressive
de l'Allemagne en 1887, en 1905, en 1911, quelques travaux furent effectués,
mais ils étaient abandonnés aussitôt l'horizon éclairci.
C'est ainsi qu'à Ecuelle, le plateau de la
Rochette, le Grand Mont d'Amance furent en partie déboisés et les voies
stratégiques empierrées et entretenues.
Finalement, après de nombreuses controverses,
l'autorisation d'effectuer des travaux est donnée par le Gouvernement le 20
juillet 1913. Ceux ci furent entrepris par la main d'oeuvre civile et militaire
entre avril et juillet 1914.
Après l'assassinat de l'archiduc François
Ferdinand à Sarajevo le 28 juin 1914, la guerre paraît inévitable, la
population s'attend désormais à la guerre.
Le début des hostilités.
Dès le 30 juillet les troupes quittent les
casernes de Nancy pour prendre les avant-postes à Velaine sous Amance,au Grand
Mont, à Ecuelle. Les chevaux sont réquisitionnés par l'Armée française.
Le 2 août à minuit, commence le premier jour
de la mobilisation générale.
De l'autre côté de la Seille, les Allemands
se préparent en occupant les positions et en renforçant leur défense. Des
incursions de patrouilles allemandes sont signalées à Nomeny, Réméréville.
L'Allemagne déclare la guerre à la France le 3 août 1914 en début
d'après-midi.
Le plan d'état major allemand consiste à
détruire rapidement l'armée française en l'encerclant par un mouvement en
tenaille: l'offensive se ferait sur deux ailes, au nord avec l'invasion de la
Belgique et à l'est par la Lorraine en évitant le système fortifié (Verdun,
Toul, Epinal, Belfort).
Le général Joffre prévoyait essentiellement
une offensive en Lorraine annexée, permettant la reconquête des terres perdues
et en bloquant les forces allemandes.
Le 14 août commence le mouvement en avant; de
Pont à Mousson à la Suisse, les troupes françaises franchissent la frontière.
Le 20 août au matin, la ligne de front va de Pont à Mousson au Donon en passant
par le sud de Nomeny et de Delme, Morhange, Dieuze et les étangs.
Si la progression se fait tout d'abord sans
trop de difficultés, elle est arrêtée le 20 août par la contre-attaque
allemande appuyée par une masse énorme d'artillerie lourde. La bataille de
Morhange se solde alors par un échec, l'ordre de retraite sur le Grand Couronné
est prescrit par le
Le général de Castelnau
Général Castelnau. Le 23 août, l'armée
française a repassé la Seille, la bataille pour Nancy va s'engager. Les forces
en ligne sont de 350.000 hommes côté allemand contre à peine 225.000 hommes
côté français.
L'été est cette année très chaud et sec, ce
qui rendra la vie des combattants particulièrement pénible.
La bataille pour NANCY
a)1ère phase: 24 au 28 août 1914
L'objectif allemand est la trouée de Charmes,
permettant d'encercler Nancy et Toul en évitant les forts.
Après de nombreux combats, l'offensive
allemande est brisée.
b)2ème phase: 29 août au 4 septembre
Malgré leur succès, les troupes françaises,
épuisées par 14 jours de combats ininterrompus, ne peuvent continuer leur
contre-offensive.
La ligne générale du front est alors la
suivante:
de Gerbeviller à Mont sur Meurthe, les
positions suivent la Mortagne puis traversent la forêt de Vitrimont, passent
par le Léomont, la tuilerie de Réméréville, Erbéviller, Champenoux et longent
les pentes du Grand Couronné jusqu'à Pont à Mousson.
Les journées des 3 et 4 septembre se passent
à organiser la nouvelle ligne et à reconstituer les unités.
c)3ème phase: 4 au 13 septembre 1914
La tentative de percée par la trouée de
Charmes ayant échoué, les Allemands vont attaquer de front et essayer
d'enfoncer de vive force les défenses du Grand Couronné.
La bataille s'engage dans l'après-midi du 4
septembre par un bombardement violent; les villages passent de mains en mains.
Le 5 septembre, le Grand Couronné est durement assailli au Mont
d'Amance et à la crête Sainte Geneviève
Le 6 au soir les Allemands passent en force
la Seille, ils attaquent, prennent, reperdent la Fourasse et Fleur Fontaine. Le
7, tandis que brûlent Fleur Fontaine, le cabaret de la Bouzule, l'Aître,
Bouxières-aux-Chênes, Ecuelle, le 206ème français est lancé dans la forêt de
Champenoux, mais il s'écrase contre les tranchées et recule.
Le 8, Castelnau confie au général Edouard
Ferry la mission de dégager le Grand Couronné avec 10 bataillons et 12
batteries de renfort.
Du 8 au 11, Ferry rétablit la situation. De
la ferme de Quercigny à celle du Tremblois le combat est acharné. Bien que les
hommes soient fourbus, ils progressent le 10 de quelques centaines de mètres au
sud de la forêt de Champenoux.
Le 11, ils atteignent la maison forestière
près de l'étang de Brin.
Le 12 septembre, sous la protection de leurs
canons, les Allemands font retraite; dans la forêt, il ne reste que des
blessés.
Le 13 septembre, la bataille du Grand
Couronné prend fin. Pont à Mousson et Lunéville sont repris sans combat.
Pendant quatre ans, les positions demeureront
sensiblement les mêmes dans ce secteur qui devint l'un des plus calmes de toute
la guerre.
Bernard JOUAUX.
L'église après les tirs d'artillerie, août
1914.
La chapelle d'Ecuelle
Les villages en ruines
André
aimait son village
la
beauté de ses paysages.
Avec
nous, il défendait le plateau,
nos
forêts et nos côteaux.
Son
dernier message,
il
nous l'a transmis,
c'est
celui d'un ami:
"Protégez
tous ces biens,
c'est
l'héritage de nos anciens.
Protégez
le pays de chez nous
contre
ses hommes, ces fous,
qui
n'ont pas vu, qu'ici,
c'est
encore le paradis."
Qui
mieux que toi,
nous
dira en patois:
"Sur
let côte, let ovrêges
po y
panre des pires;
"l'autoroute",
que les sacrés ouarés let
velon
fare pésséye pa
déri
la fine-Egue
y ne
fame que sénsse fiesse...."(1)
Aujourd'hui,
tu es parti
pour
le voyage sans retour.
Nous
te disons à notre tour:
"André,
notre Ami,
ton
message nous l'avons compris".
(1)Version
française:"Sur la côte, la carrière pour y prendre des
pierres;"l'autoroute", que les gaillards-là veulent faire passer par
derrière la Fine-Aiguille; il ne faut pas que cela se fasse..."
Ce
livret est dédié à notre Ami
André
GIRSCH
Membre
du Conseil d'Administration
de
notreAssociation, qui nous a quitté
le 12
Septembre 1994.
Chroniques de Bouxières aux
Chênes:
ANNEE 1914
Bouxières-aux-Chênes
comptait 876 habitants dont 266 électeurs.
Maire: Anatole Voinier;
Adjoint: Charles Florentin;
Conseillers municipaux:Mouchette, Mouchot, Gérard Paul, Haudeville Emile,
Henne Joseph, Petitjean Paul,
Jacot, Gérard Félix, Chatton Anatole, Perrin
E.;
Direct. des postes: Mme Voinier; Télégraphe: Petitjean;
Facteurs: Voirgard, Viriot, Malgras;
Gardes champêtres: Christophe, Bonnabelle Camille, Henne Théophile;
Agriculteurs propriétaires: Chatton Emile, Papelier, Mouchette, Florentin,
Mourot, Petitjean, Olivier, Hauuy;
Apiculteurs: Baraban, Olivier, Guyon;
Boulanger:Kippeurt;
Buraliste: Vial;
Bouchers, charcutiers: Kippeurt, Dimnet H.;
Cafetiers: Kippeurt, Viry, Pougnaux, Haudeville Ch.;
Charpentiers, menuisiers:Gérard, Marcilly, Ribard, Robert;
Charrons: Copin, Robert;
Coiffeurs: Masson, St. Mihiel; L'église avant la tourmente
Coquetier: Thouvenin Ad.;
Couturières: Mme Gérard; Mlles Henne, Richard;
Epiciers: Perrin, Kippeurt, Pougnaux, Viry, Haudeville;
Forgerons: Viry, Rodhain;
Hôtels-restaurants: Royer, du "Cheval Rouge", Kippeurt, Viry;
Maçons:Charton, Boulet, Fournier, Viriot;
Médecins: Dr. Quenette (Leyr), Papelier (Leyr);
Repasseuses: Mlles Arambourg, Henne, Richard;
Sages-femmes: Mme Christophe, Mlle Henne;
Tonneliers:
Noël, Ribard, Marcilly;
Vannier: Baptiste;
Viticulteurs: Gérard, Voinier, Mouchot, Baraban, Robin;
Vitriers: Ribard, Marcilly, Gérard;
Rentiers: Chatton E., Papelier Vve.E., Hermant J.B., Peltier,
Voinier Hubert, Mouet, Martin;
Ecarts: Moulins, Ecuelle, Blanzey, Quercigny, Candale;
Fêtes patronales: Dern. dim. d'août pour Bouxières,
2ème dim. de mai pour Ecuelle,
4ème dim. d'octobre pour Moulins et Blanzey
-o-o-o-o-
A la déclaration de guerre le 3 août 1914,
les hommes mobilisables sont partis rejoindre leur régiment.
Chaque année, de 1914 à 1918, les garçons de
18 ans partaient à la guerre et c'est ainsi, parfois, que père et fils se
retrouvaient dans les tranchées.
Bien que Bouxières-aux-Chênes n'ait pas été au coeur du combat, le
village fut bombardé: Ecuelle fut totalement détruit ainsi que la chapelle;
Bouxières fut partiellement touché; son église a brûlé mais la statue de St.
Pierre, aujourd'hui dans le porche de l'église, était restée intacte sur son
pan de mur . Beaucoup d'habitants sont partis sous les bombardements et ont
trouvé refuge au manoir de Blanzey, à Eulmont et à Bouxières-aux-Dames. Après
le plus fort de la bataille, beaucoup sont revenus habiter dans les ruines.
Pour la petite histoire, Monsieur Paul Girsch
et Mademoiselle Angèle Pleut ont été le dernier couple marié dans l'ancienne
église le 23 juillet 1914.
La reconstruction de Bouxières-aux-Chênes et
de ses écarts commença en 1920 et fut réalisée en grande partie par des
ouvriers Alsaciens ( charpentiers, maçons, menuisiers, etc..). Beaucoup se
marièrent avec les jeunes filles du village et des environs; certains couples
sont restés au pays et d'autres partirent en Alsace.